Leur île, leur destin !

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Dossier - 06/05/2021

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C’est une aventure exceptionnelle que nous allons vous raconter. Celle d’Amélie Goossens et d’Etienne Menguy qui sont les deux locataires d’île de Quéménès. A l’issue de cette entretien, Amélie nous raconte ce coup de foudre pour ce projet et son quotidien d’insulaire.

L’Ile de Quéménès est la propriété du Conservatoire du Littoral. Elle fait partie de l’Archipel de Molène et elle couvre une superficie de 0.3 km². L’île où vivent nos deux robinsons compte exactement 3.5 km de côte. Aucun arbre ne pousse sur ce petit bout de terre au milieu de la Mer d’Iroise au large du Conquet. Pourtant, Amélie et Etienne décident en 2017 de tout plaquer pour se lancer dans cette aventure.

Photo : Frédéric Lerrey

Un projet de vie 

Amélie et Etienne se sont rencontrés en études supérieures. Les deux ingénieurs construction bois vont suivre une trajectoire dédiée à leur formation dans un premier temps. Mais pour le couple, 2017 sonne comme l’année du changement avec une forte envie d’entreprendre. Des envies abstraites qui mènent à un beau jour de printemps en 2017. Un ami d’Etienne déniche un appel à candidatures que le Conservatoire du Littoral lance pour devenir les heureux locataires d’une île. L’île est située au large des côtes du Finistère. Elle est balayée par des vents d’ouest en toute saison : l’île de Quéménès. Si pour Etienne, le coup de foudre est immédiat. Amélie a d’abord pensé à une blague : « Lorsque Etienne m’a présenté ce projet, j’ai eu un grand éclat de rire. ». Mais l’idée fait son chemin et après une pèlerinage sur le chemin de Saint-Jacques-de-Compostelle, la jeune femme se laisse également séduire par ce projet insolite. C’est lors d’une visite organisée sur l’île que le coup de cœur saisit Amélie « Il faut qu’on se dépêche de répondre à la candidature ». La date butoir pour déposer le dossier de candidature était fixée au 26 septembre « c’était symboliquement la date des 30 ans d’Etienne ». Un mois plus tard, la mairie du Conquet retient leur projet : un projet de vie d’au moins neuf années où ils seront les heureux locataires d’une île d’Iroise. Il faudra attendre le début 2018 pour voir leurs quotidiens se bouleverser : « Je crois qu’Etienne n’avait pas pour aspiration à rester quotidiennement devant un ordinateur. Moi j’aimais beaucoup ce que je faisais mais les trajets pour aller au travail étaient parfois longs. Dans notre temps libre, nous étions très curieux de toutes les activités en lien avec le monde agricole » . La boucle est bouclée.

Un premier pas sur l'île

Les allers et retours sont incessants durant plusieurs mois pour les nouveaux locataires de l’île qui aménagent et prennent possession des lieux. L’île contient près de 50 panneaux solaires et une éolienne, ce qui répond aux besoins en électricité. Le couple s’adonne également à leurs nouvelles activités. En effet, même si l’île ne contient pas d’arbres, elle est en partie couverte de prairies, d’herbes et de friches. Ils suivent donc quelques formations en lien étroit avec la Chambre d’Agriculture. Ce qui leur permet de mettre en culture leurs champs. Les sentiments qui parcourent Amélie au début de cette aventure sont rassurants pour ses proches parfois angoissés par ce nouveau départ : « Les premières semaines sur l’île, nous nous sommes sentis tout de suite à notre place. La première fois que nous avons débarqué sur l’île, c’était avec un sac, quelques denrées alimentaires et des affaires ». Sur cette terre naufragée, une maison d’hôte avec une cuisinière, une table et deux bancs. Mais le cadre apaisant de l’île conforte Amélie et Etienne. « Avec du recul, je comprends que nos proches ont pu se poser des questions sur ce choix de vie. Mais l’envie, la motivation et l’énergie étaient tellement fortes ». Pour preuve, une attache remorque qui cède en bas de la grève qui mène à leur habitation lors de l’aménagement. Tous les meubles étaient dans la remorque, il a fallu trouver une solution pour les faire parvenir jusqu’à la maison : « Emotionnellement, ce sont les Montagnes Russes ! Même dans les moments difficiles, il y a une résilience et une capacité d’adaptation ».

Photo : Margot le Moan

Une aventure pleine de sens

L’ambition ne manque pas sur l’île de Quéménès. Cette interface entre la terre et la mer permet aux deux habitants de faire murir des idées pour leurs activités sur l’île mais la réglementation limite parfois les possibilités. C’est donc de naturellement qu’ils vont développer les activités déjà conduites par les précédents locataires de l’île. Mais, à leur manière : « On y a apporté notre touche. Nous avons continué la pomme de terre en intégrant sept variétés. Nous cultivons de l’ail, de l’oignon et des échalotes l’année qui suit ». Les légumes se plaisent bien sur l’île avec la capacité d’être transformés facilement. Il faut dire que ces légumes sont bien implantés dans le Finistère. Pour autant, il ne faut pas parler de routine à Amélie qui estime qu’il faut sans cesse s’ajuster. « Ce qui fonctionne pour une année, ne fonctionne pas de la même manière l’année suivante ». Par rapport à l’année dernière où la récolte de pomme de terre était bonne, les rendements sont nettement moins bons cette année. La piste météorologique est privilégiée avec l’absence de précipitations et les conditions plus froides au printemps notamment. Au cours de ces dernières années, l’activité s’est diversifiées avec les chambres d’hôtes sont venues ajoutées un attrait supplémentaire pour un tourisme naturel et dépaysant. Enfin jamais à court d’innovations, la mer regorge de ressources. Etienne ayant le pied un peu plus marin que sa compagne ; il s’intéresse aux activités aquatiques et en particuliers aux algues. Voici les quelques cordes qu’ont dressé à leur arc les deux insulaires.

Lorsque l’on demande à Amélie son moment préféré sur l’île. Elle hésite, elle réfléchit en admettant qu’ils sont nombreux : «  La magie de la nature s’est opérée lorsque deux agneaux sont venus au monde, ça a été une vive émotion. Les premiers hôtes que l’on a reçu sur l’île, c’est un moment marquant avec des rencontres pleines de sens où des liens importants sont établis » . Au cours de l’entretien, nous remarquerons le lien très fort qui existe entre ce lieu et le couple. Contrairement aux apparences qu’évoquent cette aventure, la vie sociale d’Amélie et Etienne est particulièrement riche avec des rencontres et des échanges merveilleux.

Une force pleine d'humilité

En 2018 , Amélie et Etienne se sont engagés pour presque un siècle (9 ans) avec le Conservatoire du Littoral sur l’île de Quéménès. L’engagement est reconductible mais pour nos deux ingénieurs, ce sont d’abord les nombreux défis du quotidien qui pilotent l’avenir. C’est avec une grande humilité que l’île apparaît à leurs yeux comme un trésor précieux. A ce sujet, ils veulent la rendre « au moins aussi belle que lorsqu’elle nous a été remise ». Un jour, le départ viendra et il faudra anticiper car dans ce rêve éveillé : « le retour à la réalité peut être rude. Ce qu’on vit est extraordinaire. Nous avons la chance de partager ces moments si singuliers ».

Justement en temps que femme et homme, l’île a fait évoluer leurs personnalités. Aujourd’hui, Amélie estime que son sens de l’anticipation en ressort renforcé : « Quand tu n’as pas de plaquette de beurre sur Molène, tu peux aller voir le voisin pour te dépanner. Sur Quéménès en revanche, il faut faire sans. Il faut prévoir tout ce qu’il faut sous la main ou apprendre justement à s’adapter, ça nous apporte de la souplesse et du détachement » . Leurs expériences riches avec des situations parfois insolites nous invitent à un recul plein de douceur sur les choses essentiels de la vie. Le spleen ne s’est jamais invité à la table d’Aurélie dont l’enthousiasme illumine chaque anecdote qui décrit cette aventure hors du commun. La maturité gagnée dans cette expérience fait relativiser ce qui peut paraître aux yeux de certains comme des contraintes qui s’accumulent. Il faut s’organiser, s’adapter et parfois revoir ses plans pour des rendez-vous médicaux par exemple. Etienne ne serait pas allé sur Quéménès sans Aurélie. Aurélie n’aura pas eu ce coup de cœur sans Etienne : « ce qui nous fait construire notre projet, c’est notre complémentarité. Elle est là dans les moments de doutes. Ils sont rares mais ils peuvent arriver. Souvent si l’un d’entre nous a un bas, l’autre relativise. Notre force, c’est d’avoir plusieurs cordes à notre arc et de relativiser. On porte ce projet avec nos cœurs et on le partage de cette manière ». La sérénité et la complicité animent la riche vie de nos deux insulaires.

Photo : Ouest-France

Un milieu fragile

L’île de Quéménès apparaît comme à la fois fragile par sa dimension toute petite et insubmersible par sa proximité à la méchante Mer d’Iroise et aux ballets incessants des vagues venues parfois de loin en Atlantique. L’équilibre reste précaire. Les deux aventuriers n’ont pas suffisamment de recul pour constater un impact quelconque sur milieu. Toutefois, l’érosion s’accélère sur le sud de l’île et les tempêtes qui sévissent au printemps fragilisent leurs cultures. En effet, les embruns brûlent les plantations de pomme de terre. Un défi qui se dresse face à eux tous les ans et des petites toiles protègent les tubercules pour faire face au sel. Mais le milieu est fragilisé depuis quelques mois par un envahisseur dont la population ne cesse de se multiplier sur l’île. Le climat doux y est pour beaucoup. Des lapins qui inquiètent Amélie : « ils pâturent l’herbage de nos brebis et posent de plus en plus de problèmes. Parfois en faisant quelques mètres, on peut en apercevoir cinq ou six ».

Amateurs du ciel que nous sommes, nous avons demandé à Amélie de nous raconter comment elle vivait le passage des tempêtes sur son île seule avec son compagnon. Attentive des prévisions, elle souligne déjà que la veille des tempêtes la mer est souvent comme un lac avec peu de mouvement. Au printemps 2020, elle se souvient : « on se sent en sécurité sur l’île. Si un coup de vent ou une tempête sont annoncés, nous sortons le bateau de l’eau comme ça on chasse la crainte qu’il soit dégradé. Le bruit du vent, c’est insistant. Quand le vent se calme, c’est un soulagement ! ». D’ailleurs, les mauvaises conditions les coupent parfois du monde. En 2020, le bateau est resté en dehors de l’eau une semaine en raison de la houle et il n’était pas question de prendre la mer durant près d’un mois. Les liaisons avec le continent sont parfois très aléatoires dans la période hivernale.

Photo : Ferme de Quéménès

Compléments d'information

Amélie et Etienne livrent dans une quarantaine de boutiques sur Brest, Pont-l’Abbé, Fouesnant, Saint-Brieuc, Plouagat mais également jusqu’en Ile-de-France.

Nous avons eu la chance d’implanter une station météorologique sur l’île de Quéménès où nous mesurons la température, l’humidité relative, la pluviométrie, la direction et la vitesse du vent.

  • Instagram : @fermedequemenes
  • Facebook : @QuemenesIleIroise
  • Twitter : @Quemenes_Iroise
  • Site internet : www.quemenes.bzh

Écrit par Stéven Tual (entretien et rédaction), publié le 6 mai (dernière actualisation le 7 mai à 8h20)

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