GIEC : Pourquoi le climat breton ne sera pas plus privilégié qu'ailleurs ?

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Dossier - 12/08/2021

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Le GIEC (groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat) vient de rendre son sixième rapport sur l'évolution du climat et ses conséquences dans les années à venir. Qu'en sera t-il pour la Bretagne où nous entendons çà et là que son climat serait "plus privilégié qu'ailleurs" dans les prochaines années ?

Le GIEC alarme pour des actions immédiates

Il est important de comprendre que le GIEC alerte depuis plus de 30 ans sur l' état des connaissances relatives à l'évolution du climat, ses causes et ses conséquences. Les scientifiques, climatologues, océanographes, nivologues de 195 pays du monde étudient leur domaine d'expertise avec des outils de plus en plus pointus pour ainsi cerner le mieux possible l'ampleur du réchauffement climatique et les impacts à l'avenir d'une augmentation de la température sur notre environnement. Entre le 1er rapport du GIEC publié en 1990 et le 6e rapport en 2021, les compétences sont devenues de plus en plus précises  en terme d'observations, de données satellitaires, de modélisations, de vulgarisation pour le grand public et même de régionalisation. Pourtant, le GIEC continue d'alerter sur les conséquences du réchauffement climatique dans les prochaines années avec plusieurs scénarios en fonction des émissions de gaz à effet de serre dans l'atmosphère. Le groupement d'experts envisage un réchauffement de 2 à 3°C d'ici 2100 dans le monde pour le scénario intermédiaire et jusqu'à plus de 4°C si les émissions continuent de progresser avec des conséquences irréversibles et des transformations majeurs dans nos modes de vie.

Non, la Bretagne ne sera pas épargnée !

Depuis quelques années, on entend que la région serait soumise à un climat " plus privilégié à l'avenir qu'ailleurs [en France] ". Factuellement, ce n'est pas faux car la Bretagne est soumise à un climat plus frais qu'ailleurs en été et plus doux qu'ailleurs en hiver. Sa situation péninsulaire lui permet également de retrouver plus facilement un vent marin. Les impacts thermiques du réchauffement climatique seront donc plus nuancés qu'ailleurs. Cependant, avec une progression de la températures moyenne de 2 à 3°C d'ici 2100, il faut s'attendre à des bouleversements majeurs qui dépassent la simple idée du climat "confortable en été". Selon les projections de temps extrêmes dans le rapport du GIEC (basé sur la période 1850-1900), les records de températures pourront être améliorés de près de 3°C en moyenne sur les stations météo. Ce qui voudrait dire que d'ici 2100, les records seront de 43°C à Rennes et Nantes, 42°C à Vannes, 41°C à Saint-Brieuc et 38°C à Brest avec une fréquence et une durée des canicules beaucoup importantes qu'aujourd'hui malgré notre situation péninsulaire. Le régime pluviométrique va également se transformer dans les années à venir. Dans les premiers rapports du GIEC, le paramètre "précipitations" n'était pas clairement identifié comme une conséquence du réchauffement du climat. Dans ce sixième rapport, on apprend que la quantité annuelle des précipitations ne va pas beaucoup évoluer mais que l'intensité des épisodes pluvieux va augmenter de près de 14 %. L'atmosphère plus chaude sera capable de stocker plus d'eau et donc de nous proposer des épisodes plus conséquents. Les cours d'eau seront donc soumis à des dynamiques plus brutales et des problématiques liés à l'aménagement du territoire se posent à Quimper, Quimperlé, Morlaix, Landerneau, Redon, Lamballe, Ancenis ou encore Châteaulin ... Des régimes pluviométriques différents ont pour conséquences également des sécheresses plus intenses et plus généralisées y compris en Bretagne. Notre région, poumon agricole serait exposée à des situations de plus en plus fréquentes mais également à une perte en qualité des sols. On estime que les jours de sécheresses seront très fréquents d'ici 2100 pendant la période estivale. 

Dans les chiffres, on constate donc que le climat sera différent et donc plus hostile à l'avenir. Et il existe beaucoup d'inconnus à l'échelle locale. La montée du niveau des océans devrait également avoir des conséquences sur notre littoral avec une érosion très marquée et des territoires menacés par exemple sur la Côte Sauvage. Si les connaissances n'identifient pas clairement de liens entre l'augmentation des tempêtes et le réchauffement climatique ; la simple idée d'un littoral plus exposé aux risques de submersions devrait donc rendre les tempêtes plus couteuses et plus destructrices pour le littoral breton. De plus, les activités économiques liées à la pêche seront également impactées par un océan avec plus d'eau douce, un océan plus acide et avec une biomasse largement fragilisée. 

Et nos paysages dans tout ça ?

La Bretagne est variée, diversifiée, typique et agricole. C'est une interface entre l'armor (la mer) et l'argoat (la terre). L'Homme s'adapte aux changements longs car ans les études des climats passés que les changements font partie de l'histoire de notre climat. Cependant, le changement climatique dont l'Homme est responsable est si rapide et si intense que les transformations se font sous ses yeux. Aujourd'hui, les activités économiques dictent très clairement les décisions et nos modèles sont parfois bousculés juste en l'espace d'une génération. Et oui, le changement climatique, ce ne sont pas seulement que des catastrophes naturelles, c'est aussi une adaptation au jour le jour. Le changement est si rapide que nos paysages vont changer et plusieurs questions demeurent sans réponses. Nos agriculteurs font des efforts pour s'adapter face aux réchauffement du climat mais quel avenir pour notre modèle productif ? La vigne fera t-elle son apparition en Bretagne d'ici 2100 ? La mais, le blé et l'orge couvrent près de 90% des cultures céréalières en Bretagne. Qu'en sera t-il en 2100 ? La question se pose évidemment pour l'agroalimentaire. Enfin le fléau de ces dernières années en Bretagne, c'est l'ulve (algues vertes). Elles prolifèrent grâce à un temps calme, généreusement ensoleillé et sec. Dans une logique de réchauffement climatique, les plages bretonnes seront régulièrement soumises à ces marées vertes puisque le schéma pour que les algues prolifèrent est amené à se produire de façon plus régulière chaque printemps, chaque été. 

La réalité d'un réchauffement du climat à 2 ou 3°C dépasse largement le cadre d'un été agréable sur la côte de Granit Rose ou en Baie d'Audierne. Les problématiques sont multiples et parfois très bien identifiées. A l'inverse, d'autres problématiques et il faut avoir l'humilité de le dire ne sont pas parfaitement cernées (par exemple le ralentissement de l'AMOC [circulation méridienne de retournement de l'Atlantique, c'est l'ensemble des courants marins dont fait partie le Gulf Stream], ce courant chaud qui circule sur le long de la façade étasunienne et canadienne qui pourrait générer des hivers plus froids en Europe ). Une chose est certaine, c'est que la Bretagne telle que nous la connaissons aujourd'hui ne sera plus la même en 2100 et ça c'est effrayant.

Écrit par Stéven TUAL, publié le 12 août (dernière actualisation le 1 novembre à 9h45)

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